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La terre vue d'en haut et le voyage cosmique

Le point de vue du poète, du philosophe et de l'historien

Pierre Hadot

pp. 31-39

Dans une lettre à Schiller, datée du 12 mai 1798, Goethe écrivait ceci : «Votre lettre m"est parvenue hier lors d"une lecture de l"Iliade, poème auquel je reviens toujours volontiers, parce qu"on y est élevé, comme dans une montgolfière au-dessus de tout le terrestre et qu"on se trouve véritablement dans cet espace intermédia ire dans lequel planent en tous sens les dieux» [1]. Dans ce texte, Goethe établit une liaison entre un événement, qui était pour lui encore tout récent et qui l"avait beaucoup impressionné, et une représentation archaique, celle du vol des dieux. Pour la première fois en effet, en 1783, l"homme s"était arraché à la pesanteur terrestre et s"était élevé dans les airs. C"est à cette expérience que Goethe se réfère pour faire comprendre l"impression qu"il éprouve en lisant Homère. Il est vrai que la poésie d"Homère nous élève en quelque sorte de terre en nous faisant voir d"en haut les choses humaines. En effet l"auditeur archaique ou le lecteur moderne des poèmes d"Homère, qui est en imagination le spectateur des événements décrits par le poète, apprend par celui-ci qu"il y a des êtres qui, du haut des airs, ou du haut des montagnes, assistent aux événements qu"il raconte. Ce sont les dieux, spectateurs privilégiés, qui, d"ailleurs, descendent parfois des cieux pour se mêler des affaires humaines. Et ainsi, tout naturellement, l"auditeur ou le lecteur fait coincider son regard avec celui des dieux.

Publication details

DOI: 10.1007/978-94-009-2993-7_6

Full citation:

Hadot, P. (1988)., La terre vue d'en haut et le voyage cosmique: Le point de vue du poète, du philosophe et de l'historien, in J. Schneider & M. Léger-Orine (éds), Frontiers and space conquest / frontières et conquête spatiale, Dordrecht, Springer, pp. 31-39.

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